1 – Des paradoxes qui interpellent
1.1 - Utilisation en hausse
Il y a des paradoxes qui interpellent. Le mois dernier, tombait un chiffre qui fit frémir de joie tous les promoteurs de la mobilité douce : selon une étude menée par l’Institut Paris Région, en 2023, la part modale du vélo (11%) a dépassé celle de la voiture (4%) pour les trajets quotidiens. Pour rappel, la même étude réalisée en 2010 positionnait le vélo a seulement 3%. Et ces chiffres sont confirmés par l’expérience quotidienne de tous les parisiens. Ceux qui s’en réjouissent comme ceux qui s’en désolent. De fait, c’est visible à l’œil nu, il y a de plus en plus de vélos dans Paris.
1.2 – Ventes en baisse
C’est dans ce contexte, qui aurait pu être euphorique, que se tenait la 6ème édition du salon Vélo in Paris au Parc Floral. Mais la grande fête du vélo se déroulait cette année dans une atmosphère plutôt morose. Car malgré le développement de sa pratique, l’industrie du vélo traverse une petite crise, illustrée par d’autres chiffres, dont la presse s’est largement fait l’écho ces derniers jours : les ventes sont en baisse sur l’année 2023.
-14% en volume (nombre de vélos vendus) et -5,5% en Chiffre d’Affaires.
C’est le grand paradoxe dont tous les experts cherchent à prendre la mesure. Et chacun y va bien sûr de son interprétation, son analyse et ses conclusions.
2 – Visite du salon pour comprendre
Sans prétendre en être un (expert) et sans m’immerger dans une étude approfondie du sujet, j’ai profité de ma visite sur le salon pour me livrer à une observation attentive des petits détails qui, parfois, en disent plus long que de longs rapports. Je vous partage ici mes conclusions très subjectives et forcément biaisées.
2.1 – Bel endroit, mais on s’y perd.
Le Parc Floral est un magnifique endroit, mais on peut s’y perdre avant de trouver le salon qui s’y tient. Et c’est précisément ce qui m’est arrivé. A ma décharge, 35 hectares, c’est très grand. Le gardien à l’entrée m’avait pourtant dit : « c’est simple ! à droite, puis toujours tout droit… ». Je crois même qu’il avait ajouté « il n’y a pas à se tromper ». Mais j’ai dû mal négocier un carrefour parce que j’ai réussi à faire deux fois le tour du Lac, à m’égarer du côté des bonzaïs, errant parmi les iris, les camélias et les rhododendrons, enivré par l’odeur des tulipes (200 variétés représentées), avant de trouver l’entrée du salon.
Conclusion : Le marché du vélo est vaste et on s’y perd. Il faut dire qu’il a longtemps été monopolisé par les sportifs et les clients « loisir ». Les premiers ont des attentes élevées mais sont des connaisseurs, alors que les seconds n’y connaissent rien mais n’ont pas beaucoup d’attentes. Les professionnels du secteur, à qui tout parait simple et évident, n’ont pas encore fait leur mu pour s’adresser efficacement à leur nouveau public, celui qui fera les gros volumes : les familles, les vélotafeurs et les professionnels qui troquent leurs camionnettes pour des vélo cargo. Ces gens là n’y connaissent pas grand-chose mais ont des attentes à la fois vagues et élevées. On les comprend puisque le vélo doit devenir leur véhicule quotidien et utilitaire.
2.2 – Top pour essayer des vélos. Mais pour le reste…
Velo in Paris est un beau salon, et la mise en avant des essais marche particulièrement bien dans le Parc Floral. Essayer un vélo n’a jamais été aussi simple et plaisant. C’est un vrai plus. Mais avec à peine 100 exposants, ça reste un petit salon. Comparable au salon Bike in Brussels, mais incomparable avec, par exemple, les Vélofollies de Courtrai. Le grand RV du vélo en France, ce sont les Pro Days, qui n’ont clairement pas le grand public pour cible (et qui se tiennent cette année à Tououse). Il n’y a donc pas de vrai, grand salon grand public pour le vélo en France.
Conclusion : Si Vélo in Paris proposait cette année un assez large choix de vélo à essayer, l’offre d’accessoires et d’équipement était quasi inexistante. De même, aucun vélo d’enfant, pas plus de draisienne et même les offres de voyage à vélo – pourtant abondantes en France, grand pays touristique - étaient très limitées. Pour un visiteur venu s’équiper ou s’informer en vue de s’équiper, mon impression est qu’il repart avec une vision extrêmement réduite de l’offre, pas forcément rassuré et donc, probablement, avec un projet d’équipement remis à plus tard.
2.3 – Choix limité mais offre trop complexe
Sur le segment que je suis de plus près – les vélos-cargo – j’ai vu Douze Cycles, bien présents avec le V2, les Long Tail et le nouveau Heta ; j’ai vu aussi Galian, qui continue d’améliorer son « Formidable » mais, à part ça, rien de bien enthousiasmant. Les absents étaient nombreux. L’offre n’est pas folichonne. Rien de bien neuf d’une année sur l’autre. Et, plus généralement, elle me parait difficilement compréhensible pour un public non averti. On arrive donc à un autre paradoxe : une offre limitée, mais encore trop complexe.
Conclusion : Acheter un vélo, ça devrait être simple, mais avec la multitude de modèles, d’options et d’équipement, j’ai le sentiment que l’acte d’achat reste beaucoup trop compliqué.
3 - Conclusion générale
En quittant le salon, je me suis demandé à qui il s’adressait. Entre le grand public, les professionnels et la clientèle de niche, il est difficile d’y retrouver ses petits. Et il faudrait un salon beaucoup plus grand et avec des villages thématiques pour relever le défi. On en est très loin. Ça n’est pas un reproche. Ceux qui s’y collent font ce qu’ils peuvent et les organisateurs de salon n’ont pas la partie facile (j’avais observé la même chose au Cargo Bike Festival à Amsterdam).
Je crois que c’est le problème majeur de l’industrie du vélo aujourd’hui : elle ne sait pas encore très bien à qui elle s’adresse, entre l’ancienne clientèle avertie et sportive, et la nouvelle, beaucoup plus large mais aussi moins sûre dans ses attentes.
On peut y trouver une explication à la chute des ventes : dans un environnement en mutation, ce secteur ne sait pas (ou plus, ou pas encore) se vendre.
4 - Mes coups de coeur
Je termine avec mes coups de cœur. Parce que j’ai quand même fait de belles rencontres sur ce salon.
4.1 - OTWO.
En ardent défenseur du made in France, j’ai été séduit par l’enthousiasme de Sebastien Frys qui propose un vélo-cargo compact et qui a d’ailleurs obtenu un prix d’innovation. Bravo à lui !
4.2 - Atelier GONNEL.
Originaires de La Rochelle et issus du monde de la voile, l’atelier propose des cadres haut de gamme, obtenus en associant notamment le bois et le carbone. Le résultat est bluffant : des vélos légers, très réactifs et en même temps très souple. Un des vélos exposés avait d’ailleurs roulé sur le Paris-Roubaix.
4.3 - MULI.
Dans la catégorie « petit cargo », j’ai pris beaucoup de plaisir à le tester en version musculaire, mix de cargobike et de citybike, dans un esprit artisanal qui me plait bien. Une belle réussite Made in Germany.
4.4 - Berthoud Cycles
L’artisan bourguignon présentait sur son stand un magnifique vélo conçu spécialement pour le Paris-Brest-Paris – une petite merveille ; ainsi qu’un très surprenant vélo urbain – maniable et véloce à souhait - et quelques autres modèles tout aussi intéressants, du gravel à la randonneuse. Evidemment tout équipés, avec les selles, les rétroviseurs et les sacoches qui portent la belle touche de l’artiste/artisan made in Bourgogne.
5 – le Bonus
Enfin, surprise et satisfaction personnelle, j’ai fait la rencontre d’un libraire qui exposait de beaux livres sur le vélo et qui se trouve être aussi éditeur. Intéressé pour découvrir les pages déjà écrites de mon manuscrit (pour info, j’écris un roman qui a pour cadre l’univers de la cyclologistique parisienne et dont le titre provisoire est « Vélo-Cargo »).
Comme quoi, il y a toujours de bonnes raisons de visiter un salon avec, à la clé, de belles relations qui se créent et des opportunités qui s’ouvrent. RDV aux Pro Days, à Toulouse, du 23 au 25 juin.
Si vous résidez dans une des villes que je parcours, ou si vous y avez des contacts liés au livre ou au vélo, faites vous connaitre en commentaire ou par email : contact@franckgirardot.com
Pendant 6 mois, de mai à octobre 2024, je vadrouille aux 4 coins de la France pour finaliser mon 1er roman "Vélo-Cargo", qui se déroule dans l'univers de la cyclologistique parisienne.
Pour aller au bout de ce projet, je me lance dans une résidence itinérante qui va parcourir 50 villes, allant à la rencontre des acteurs de la cyclologistique, des professionnels du livre et, bien évidemment, de mes futurs lecteurs !
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Vélo-Cargo
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